23 févr. 2010

Hivernage en vue…

Depuis le départ du dernier bateau, flotte sur la base un parfum particulier… Les travaux de chacun se terminent, le sea-truck a été sorti de l’eau, les derniers campagnards d’été font leurs bagages. Ça parle vacances, invitations à se revoir en métropole, programmation de la prochaine campagne d’été… Eh oui, l’arrivée de R4 est imminente, et si la météo le permet, le bateau devrait repartir le 28 février, nous laissant entre hivernants pour les 8 mois à venir.Les sentiments sont mitigés : certains hivernants ont hâte, d’autres regrettent presque déjà cette sympathique campagne d’été… En ce qui me concerne, j’ai énormément apprécié les 4 premiers mois passés ici et l’excellente ambiance régnant sur la base, mais je suis impatiente de connaître la suite. Plus que tout, le départ du dernier bateau sera un soulagement pour moi. A partir de ce moment là, rien ni personne ne pourra plus m’empêcher d’hiverner, il n’y aura plus de retour en arrière possible. Tant que le dernier bateau n’est pas parti, personne n’est à l’abri d’un banal souci de santé ou de logistique obligeant à rentrer. Ceci est déjà arrivé, j’y pense souvent, c’est ma hantise.

Je me sens donc incroyablement bien à la veille de ce tournant majeur. Rien ne me lasse, tout m’émerveille, il y a encore tant de choses à découvrir ici ! Je m’y sens plus que jamais chez moi, comme si j’étais partie en voyage et que j’étais enfin rentrée à la maison. Je mesure chaque seconde la chance que j’ai d'être ici, j'ai la gorge serrée à chaque balade, comme si je voyais ces paysages pour la première fois. Rares sont les gens qui ont l’opportunité de réaliser un rêve d’enfant, j’en ai parfaitement conscience. Souvent je me dis que je donnerai cher pour que mes proches soient à ma place, juste l’espace de quelques minutes, pour goûter à leur tour au bonheur d’être ici. J'ai également l’impression d’avoir trouvé ma place dans la mission, l’ambiance de groupe devrait être excellente.


Ces dernières journées ont été assez extraordinaires. J’ai eu l’occasion d’aller avec Marie baguer des poussins pétrels des neiges et damiers du cap sur certaines îles de l’archipel. Crapahuter dans les cailloux à la recherche des nids, se contorsionner pour réussir à attraper les poussins situés sous les cailloux, lutter contre les rafales de vent, tenir dans ses mains ces touchantes petites bêtes… Forcément, j’ai adoré ! Cela m’a permis également d’observer de loin un poussin pétrel géant, si grand mais encore recouvert de duvet, une vraie peluche.

Pour continuer sur ma lancée de portraits des oiseaux se reproduisant ici, un petit point sur les pétrels des neiges… De la même famille que les pétrels géants (les Procellariidae), ils sont bien plus petits (30-40 cm de long, 75-95 cm d’envergure), et leur plumage immaculé leur donne une allure de « colombe de l’Antarctique ».



Ils ont un cri rauque, sorte de caquètement que beaucoup prétendent inélégant. Certes cela surprend au regard de l’allure de cet oiseau, mais j’aime beaucoup. Ils nichent sous les cailloux, dans des terriers parfois très profonds. Pour se défendre, ils crachent un liquide huileux fortement nauséabond, le « vomi de pétrel ». Cette attaque fulgurante a une sacrée réputation ici, qui est loin d’être surfaite…

Ils se reproduisent sur la côte antarctique (péninsule comprise), à l’intérieur du continent jusqu’à environ 300 km, et sur quelques îles proches du continent. L’hiver, ils remontent vers le nord, sans dépasser les 60e. Ils vivent relativement longtemps, la doyenne des bagués sur l’archipel ayant fêté cette année ses 46 ans ! Ils se nourrissent de céphalopodes, crustacés et petits poissons. Ils sont monogames et les couples restent stables. Ils arrivent sur leur site de reproduction vers octobre, et se reproduisent entre novembre et décembre, en pondant un unique œuf. Les deux partenaires s’occupent du poussin, qui nécessite de l’attention pendant une cinquantaine de jours.

Poussin pétrel des neiges et l’un de ses parents

Poussin pétrel des neiges

De leur côté, les poussins Adélie ont pratiquement tous finis de muer. Ils font leurs premières brasses. Cela manque de coordination, ils sont si drôles quand ils essaient de sortir de l’eau et glissent sur les glaçons ! Les colonies sont désertées par les adultes, partis se nourrir en mer en vue de leur mue prochaine.

Poussin Adélie en fin de mue, ne reste que la crête de duvet sur le sommet du crâne…

Adélie en train de « marsouiner », c’est-à-dire sauter hors de l’eau comme le font les dauphins, ce qui leur permet de respirer sans perdre de vitesse (seules trois espèces de manchot en sont incapables)…

Les poussins skuas font leurs premiers vols, ils sont encore maladroits. J’ai également pu (enfin !) observer mon premier léopard des mers, et j’avoue avoir été très impressionnée. Il était en train de manger un manchot immature, et dégageait une puissance faisant froid dans le dos.

Léopard des mers en train de croquer un manchot Adélie

Je n’ai jamais pris autant conscience du cycle de la vie qu’ici : on a vu les parades, les oiseaux pondre, les œufs éclore… J’ai tremblé pour les poussins lors des premières tempêtes, j’ai maudit les skuas qui les dévoraient sous nos yeux… J’ai eu bien souvent envie d’intervenir pour aider l’un ou l’autre à survivre. Mais les skuas, léopards et pétrels géants doivent eux aussi nourrir leur progéniture, c’est la loi et nous nous devons de la respecter en restant spectateur… Maintenant tous ces petits Weddell, manchots, pétrels, skuas et autres oiseaux s’apprêtent à quitter l’île, la boucle est bouclée et un nouveau cycle va pouvoir commencer.

Voilà pour les dernières nouvelles. La température a fortement chutée ces jours derniers, nous sommes allégrement passés en dessous de la barre de -10°C, pour atteindre -16,6°C la nuit du 22 au 23 février, température jamais enregistrée à DDU en février (encore un record !). Comme le vent est toujours bien présent, il commence à faire frais… Les bergs défilent autour de l’île. Ils restent parfois quelques jours ou semaines à la même place, puis un beau matin, plus rien. Ils sont partis, ou se sont désintégrés… Voilà un berg que j’aimais beaucoup. J’avais un petit espoir qu’il reste dans le coin jusqu’à la formation de la banquise, mais lui aussi n’a fait que passer…

Berg « dent de requin » ou « sapin », selon l’imagination de chacun…

Pour finir, sachez que certains mails que l’on m’envoie ou que j’envoie se perdent dans les méandres du web et n’arrivent jamais. En général je réponds toujours rapidement à vos messages, donc si je ne vous réponds pas, n’hésitez pas à me renvoyer le mail en question…

Neige soulevée par le vent au coucher du soleil

1 commentaire:

  1. Bonjour,
    Je suis un ami de Marie-France Roy qui est parmi vous.
    Auriez-vous la gentillesse de lui dire que j'ai bien reçu sa belle carte de vœux hier (expédiée le 20/12/2009) mais qu'elle a oublié de me donner son adresse mail à la base ?
    J'imagine combien les contacts avec le reste du monde peuvent être réconfortants et je serais très heureux de pouvoir dialoguer.

    Toutes mes coordonnées figurent ci- dessous.

    Vous remerciant par avance de votre aide, je vous souhaite bon courage et beau temps durant cet été austral.

    Cordialement

    Benoit Reyre
    Directeur commercial
    Sobea Environnement
    11 rue du Buisson aux Fraises
    91302 Massy Cedex

    Tel : 01.60.13.65.00
    Fax : 01.69.81.72.76
    GSM : 06.03.30.26.95
    Assistante : 01.60.13.65.05

    Mail : benoit.reyre@vinci-construction.fr

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